Suites de Cauchy et complétude : Cours et exercices corrigés

La notion de complétude, à la lisière du programme de licence, est essentielle dans l’étude des réels. Cet article en propose une définition et une caractérisation, accompagnées d’un exemple.
Cauchy

La notion de complétude, à la lisière du programme de licence, est pourtant essentielle dans l’étude des nombres réels. Cet article en propose une définition et une caractérisation, accompagnées d’un exemple.

Définitions

Définition : Une suite (u_n)_{n \in \mathbb{N}} à valeurs dans un espace normé (E,\| . \|) est dite de Cauchy si : \\ \forall \epsilon > 0, \exist n_0 , \forall p,q \geq n_0 , \| u_p - u_q \| \leq \epsilon .

Il faut voir cette définition comme une condition d’uniformité sur les termes de la suite. C’est à dire qu’à partir d’un certain rang (aussi grand soit-il), deux termes quelconques de la suite sont proches à epsilon près.

Définition : Un espace normé (E,\|.\|) est dit complet si toute suite de Cauchy de E est convergente.

Par exemple, le premier espace complet que vous avez rencontré est \mathbb{R} . Ceci est développé dans l’exemple suivant.

Exemple fondamental d’ensemble complet

Pour démontrer la complétude de \mathbb{R} , on va d’abord obtenir le résultat classique suivant :

Propriété : Une suite de Cauchy converge si et seulement si elle admet une valeur d’adhérence.

Preuve : Le sens direct est immédiat.
Pour la réciproque, on se donne (u_n)_{n \in \mathbb{N}} à valeurs dans E telle que : \exist \varphi, \lim_{n \to \infty} u_{\varphi(n)} = l. \\ Soit \epsilon > 0 , d’une part : \exist n_0, \forall n \geq n_0 : \| u_{\varphi(n)} - l \| \leq \frac{\epsilon}{2} . De plus, (u_n)_{n \in \mathbb{N}} étant de Cauchy, on a que :

 \exist n_1, \forall p,q \geq n_1, \| u_p - u_q \| \leq \frac{\epsilon}{2}  

En notant n_2 := max(n_0,n_1) , il vient alors que pour tout n \geq \varphi(n_2) :

 \\ \| u_n - l \| = \| u_n - u_{\varphi(n_2)} + u_{\varphi(n_2)} - l \| \leq \| u_n - u_{\varphi(n_2)} \| + \| u_{\varphi(n_2)} - l \| \\

Or n \geq n_1 , et \varphi(n_2) \geq n_2 \geq n_1 et \varphi(n_2) \geq n_0 donc : \| u_n - u_{\varphi(n_2)} \| \leq \frac{\epsilon}{2} et \| u_{\varphi(n_2)} - l \| \leq \frac{\epsilon}{2}. \\ Finalement : \|u_n - l \| \leq \epsilon . On a bien montré que (u_n)_{n \in \mathbb{N}} converge vers l .

Théorème : \mathbb{R} est complet.

Preuve : Avec ce qui précède, il suffit de montrer qu’une suite de Cauchy (u_n)_{n \in \mathbb{N}} réelle admet une valeur d’adhérence, et on pourra conclure. Pour faire cela, on va utiliser la propriété de Bolzano-Weierstrass qui donnera l’existence d’une extraite convergente sous réserve que (u_n)_{n \in \mathbb{N}} soit bornée. Montrons que c’est le cas : \\ (u_n)_{n \in \mathbb{N}} est de Cauchy, d’où : \exist n_0, \forall n \geq n_0, \| u_n - u_{n_0}\| \leq 42. \\ Alors, M := max( \| u_0\|,\| u_1 \|, \dots, \| u_{n_0 -1} \| , \| u_{n_0} \| +42) est une borne de (u_n)_{n \in \mathbb{N}} , ce qui achève la preuve.

Remarque : À partir de ce qui précède, on peut facilement étendre la preuve et montrer que tout \mathbb{R} -espace vectoriel de dimension fini est complet. On en déduit donc en particulier que \mathbb{C} est aussi complet.

Exercice d’application

Énoncé : Montrer que E est complet si et seulement si, dans E , la convergence absolue d’une série entraine sa convergence.

Corrigé : (\Rightarrow) Commençons par le sens direct. Soit (a_n)_{n \in \mathbb{N}} telle que \displaystyle \sum_{n=0}^{+ \infty} \| a_n \| converge. Pour obtenir la convergence de la série de terme général a_n , on va montrer que la suite des sommes partielles (S_n)_{n \in \mathbb{N}} est de Cauchy, ce qui donnera la convergence, car l’espace est supposé complet. Soit \epsilon > 0 , par convergence de la série , il existe n_0 tel que \displaystyle \sum_{n=n_0}^{+ \infty} \| a_n \| \leq \epsilon . Soient p,q \geq n_0 , on suppose que p \geq q sans perte de généralité. On a :

 \| S_p - S_q \| = \| \displaystyle \sum_{n=q}^p a_n \| \leq \displaystyle \sum_{n=n_0}^{+ \infty} \| a_n \| \leq \epsilon.

Donc la suite des sommes partielles est de Cauchy, donc est convergente, ce qui achève la démonstration du sens direct. \\ (\Leftarrow) Pour le sens réciproque, on se donne (u_n)_{n \in \mathbb{N}} de Cauchy, et on va montrer que cette suite admet une valeur d’adhérence, ce qui donnera sa convergence d’après ce qui précède. L’existence d’une extractrice \varphi telle que, pour tout entier n:

\forall m \geq \varphi(n), \|u_m - u_{\varphi(n)} \| \leq \frac{1}{42^{n}}

est immédiate en appliquant récursivement que (u_n)_{n \in \mathbb{N}} est de Cauchy. On a alors en particulier que :

\forall n, \|u_{\varphi(n+1)} - u_{\varphi(n)} \| \leq \frac{1}{42^{n}}. 

Ainsi, \|u_{\varphi(n+1)} - u_{\varphi(n)} \| est le terme général d’une série convergente (par comparaison à une série géométrique), mais alors avec l’hypothèse on a que (u_{\varphi(n+1)} - u_{\varphi(n)}) est aussi terme général d’une série convergente, et une simplification téléscopique donne finalement que (u_{\varphi(n)})_{n \in \mathbb{N}} est convergente, et donc que (u_n)_{n \in \mathbb{N}} converge d’après ce qui précède. CQFD

Remarque : Ceci fournit une autre preuve que \mathbb{R} est complet, car le cours de première année indique que la convergence absolue d’une série réelle entraine sa convergence.

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